Reconnaître la contribution extraordinaire
des chargées et chargés de cours
Mémoire soumis au ministère des Finances
Consultations prébudgétaires
Février 2021
Le Syndicat des chargées et chargés de cours de l’UQO (SCCC-UQO) a été fondé en 1992 et a été accrédité en 1993. Il est affilié à la Fédération nationale des enseignantes et enseignants du Québec (FNEEQ) et à la Confédération des syndicats nationaux (CSN). Avec près de 700 membres, il est le syndicat le plus représentatif de l’UQO. En plus d’offrir près de 70 % des cours de premier cycle, les personnes chargées de cours offrent près de 30 % des cours de deuxième cycle et 10 % des cours de troisième cycle. Le tiers des membres du SCCC-UQO enseigne au campus de Saint-Jérôme.
Dans un contexte de pandémie, le SCCC-UQO aimerait profiter des consultations prébudgétaires pour conscientiser le gouvernement du Québec sur l’importance de placer les ressources enseignantes au centre de sa stratégie en enseignement supérieur. Depuis presque un an, les chargées et chargés de cours portent à bouts de bras la continuité du service public. Les ressources enseignantes ont consacré beaucoup de temps pour adapter leurs cours sans reconnaissance de l’UQO. Sans leur détermination, les étudiantes et les étudiants n’auraient pas pu poursuivre leurs études.
Un manque de reconnaissance
Les personnes chargées de cours sont rémunérées à forfait. Elles n’ont pas la possibilité de compenser le surcroît de tâches ailleurs. Par exemple, une professeure ou un professeur d’université est rémunéré pour l’enseignement, la recherche, des tâches administratives et des services à la collectivité. Ainsi, par vases communicants, ils peuvent réduire certaines tâches afin de compenser partiellement le temps consacré à l’adaptation des cours en mode non présentiel. Tel n’est pas le cas des personnes chargées de cours qui ne sont rémunérées que pour les tâches d’enseignement, sans tenir compte du temps de préparation.
Le surcroît de travail est énorme. Les chargées et chargés de cours ont d’abord dû se former aux plateformes numériques et à la pédagogie à distance. Ils ont dû adapter le contenu de leur cours. Ils ont créé des méthodes innovantes pour évaluer les connaissances.Toutes ces tâches n’ont pas été rémunérées en heures supplémentaires. Les universités ont imposé un bénévolat obligatoire aux chargées et chargés de cours.
En plus des tâches supplémentaires, les ressources enseignantes sont confrontées à des problématiques de santé psychologiques des étudiantes et des étudiants. Cela fait augmenter la charge mentale. Une fatigue généralisée du corps enseignant des universités est perceptible. Il est temps de donner un coup de barre afin de reconnaître la contribution extraordinaire des personnes chargées de cours comme travailleuses et travailleurs essentiels en temps de pandémie.
Des enveloppes dédiées aux ressources enseignantes
Le ministère de l’Enseignement supérieur a déjà injecté des sommes dans les universités pour faire face à la pandémie. À l’UQO, 667 700$ ont été injectés dans l’enveloppe « Réussite en enseignement supérieur et relance économique », 697 900$ dans l’enveloppe « Soutien additionnel aux étudiants en contexte de crise sanitaire » et 188 622$ dans l’enveloppe « Santé mentale – étudiants ». La subvention de fonctionnement a donc été accrue de 2,2 % pour faire face à la pandémie.
Le SCCC-UQO reconnaît un certain effort du gouvernement pour maintenir un service qu’il juge essentiel. Toutefois, nous aimerions émettre trois critiques.
- Ces montants sont peu élevés face aux bouleversements que les universités ont vécus. La majorité des cours a basculé en mode non présentiel. L’enseignement virtuel ne s’improvise pas et a demandé une adaptation importante autant dans l’enseignement que dans l’évaluation des connaissances.
- Contrairement au financement du réseau collégial, aucune enveloppe n’était dédiée aux ressources enseignantes. Pourtant, celles-ci sont au cœur de l’adaptation des cours, qui a permis la poursuite de la mission éducative malgré les mesures sanitaires. Ainsi, les sommes supplémentaires versées ne se sont pas rendues aux travailleuses et aux travailleurs de première ligne : les enseignantes et les enseignants.
- La reddition de compte était insatisfaisante. Les universités avaient une trop grande autonomie pour affecter les nouvelles sommes. Nous croyons que le gouvernement du Québec doit rendre les directives plus claires et avec une réelle reddition de compte lorsqu’il accorde de nouvelles enveloppes budgétaires.
Le SCCC-UQO demande au gouvernement du Québec une reconnaissance de la surcharge de travail ainsi que des enveloppes dédiées à une rémunération juste de l’adaptation des cours à l’enseignement en non-présentiel. Le SCCC-UQO demande aussi une juste compensation rétroactive du temps supplémentaire travaillé par les personnes chargées de cours. Enfin, le SCCC-UQO souhaite l’instauration de mécanismes de reddition de comptes pour s’assurer que les enveloppes supplémentaires soient dépensées adéquatement.
L’Outaouais, une région désertée
Au-delà de la pandémie, l’Outaouais fait face à un déséquilibre chronique dans le financement des services publics. La région compte sur la rive ontarienne pour ses services en santé et en enseignement supérieur. Or, dans ce contexte sanitaire, la souveraineté alimentaire et l’achat local ont été maintes fois rappelés. Nous croyons que notre région ne devrait plus dépendre des collèges et des universités de l’Ontario. L’étude de l’IRIS de 2018 démontre clairement que, comparativement à des régions semblables, l’Outaouais compte beaucoup moins de programmes collégiaux et universitaires, et possède un ratio beaucoup plus faible d’étudiantes et d’étudiants par rapport à la taille de la population.
Les chiffres sont clairs. L’Outaouais ne compte que 19 programmes de baccalauréat, comparativement à 41 au Saguenay-Lac-Saint-Jean et à 32 en Mauricie. L’Outaouais compte 8,6 étudiantes et étudiants universitaires, comparativement 17,7 au Saguenay-Lac-Saint-Jean et 37,5 en Mauricie. Le mode de financement actuel des universités, où le calcul se fait sur la base du nombre d’étudiantes et d’étudiants en équivalent temps plein, fait en sorte qu’un cercle vicieux s’installe. L’Université n’a pas les moyens de créer de nouveaux programmes qui pourraient à leur tour augmenter l’inscription et entraîner une augmentation de la subvention.
L’UQO a besoin d’un réinvestissement et ce réinvestissement ne doit pas se limiter à un campus unifié. Il faut créer de nouveaux programmes afin de pouvoir retenir des étudiantes dans la région. Ainsi, le SCCC-UQO demande au gouvernement du Québec un effort historique pour que la région de l’Outaouais soit desservie adéquatement en services publics.
Laurentides, une région en développement
Rappelons que l’UQO compte un important campus universitaire à Saint-Jérôme qui est au centre d’une des régions les plus dynamiques au Québec. De 2019 à 2020, les Laurentides forment la région qui a connu la plus forte croissance démographique avec une augmentation de sa population de 17,7 % en une année. Elle constitue la quatrième région administrative la plus peuplée. Elle se démarque également par une population jeune où les habitants de 10 à 14 ans (5,6 % contre 5,3 % pour l’ensemble du Québec) et ceux de 15 à 19 ans (5,2 % contre 5,0 % pour l’ensemble du Québec) sont surreprésentés. Nous pouvons prévoir une forte demande pour des études universitaires dans les années à venir. L’Université du Québec en Outaouais pourra-t-elle retenir une partie importante des étudiantes et des étudiants? Il est urgent d’y développer des programmes universitaires pour répondre aux besoins de cette région
Conclusion
En somme, les personnes chargées de cours ont permis la continuité du service public. Leurs efforts ont mal été reconnus et se sont faits sur la base du bénévolat forcé. Les sommes supplémentaires offertes par Québec aux universités ne se sont pas rendues en première ligne. Il est urgent d’agir afin de reconnaître leur contribution exceptionnelle.
Par ailleurs, le gouvernement du Québec doit reconnaître les besoins importants en programmes universitaires dans les deux régions desservies par l’UQO : l’Outaouais et les Laurentides. Le développement de programmes doit se faire en collaboration avec celles et ceux qui sont au centre de la mission éducative des universités : les chargées et chargés de cours.
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