Le Syndicat des chargées et chargés de cours de l’UQO (SCCC-UQO) a été fondé en 1992 et a obtenu son accréditation syndicale en 1993. Il faudra attendre presque quatre ans après le dépôt de la requête en accréditation pour obtenir une première convention collective. Ce n’est pas un délais anormal dans le contexte de l’adoption d’une première convention collective. Toutefois, la seconde négociation allait s’avérer tout aussi difficile. Le Comité de négociation était alors composé de Marie-Josée Bourget, Richard Perron, François Brouard, Louis-Charles Sirois et Carole Julien. Cette négociation a duré deux ans et demi et son thème, lancé le 14 février 2000, était Mon cœur bat pour les chargées et chargés de cours.
Le mandat de grève avait été obtenu autant en fonction de causes intérieures que de causes extérieures de l’UQAH. La politique du déficit zéro du gouvernement de Lucien Bouchard avait entraîné des coupures importantes dans les universités. Ainsi, la négociation des clauses monétaires allaient s’avérer extrêmement difficiles. Il faudra un vote de grève afin de faire débloquer plus de deux ans de négociation.
Néanmoins, Trois-Rivières est le véritable lieu d’origine de ce vote de grève. Durant l’année 1996-1997, les personnes chargées de cours de l’UQTR avaient exercé une grève de 40 jours. Pour suspendre le conflit, les parties patronale et syndicale avaient convenus de confier à l’Institut de la statistique du Québec (ISQ) le mandat de comparer le salaire des profs et celui des personnes chargées de cours. En novembre 1999, le résultat de l’étude est tombé. Pour la prestation d’un cours, l’écart salarial moyen était de 71,5% entre un prof et une personne chargée de cours. Une nouvelle grève allait éclater à Trois-Rivières au trimestre d’hiver 2000 et plusieurs cours du trimestre du printemps 2000 allaient être annulés, ce qui a été perçu comme un lock-out par le syndicat. Le SCCC-UQAH ainsi que tous les syndicats affiliés à la FNEEQ avaient alors appuyé leurs collègues de Trois-Rivières, bien que ce syndicat était affilié à la FTQ. L’Assemblée générale du SCCC-UQAH avait même fait un don de 3000$ au SCC-UQTR, somme considérable pour un petit syndicat.
Le 24 mars 2000, une coordination intersyndicale avait été créée afin d’unir les personnes chargées de cours de tout le Québec. Ainsi, tous les syndicats affiliés à la FNEEQ, ainsi que les syndicats de l’UQTR (FTQ) et de l’Université de Sherbrooke (CEQ) ont uni leur force pour réclamer des augmentations salariales substantielles. C’est la parité salariale avec les professeures et professeur qui était réclamée dans les négociations locales. De plus, cette alliance permettait d’en faire un enjeu national en interpellant le ministre de l’Éducation de l’époque, François Legault.
À ce moment, les personnes chargées de cours de l’UQTR étaient déjà en grève et celles de l’UQAM et de l’UQAR avaient voté un mandat de grève. Comme la majorité des syndicats négociaient en même temps, une concertation avait été faite afin de mettre de la pression sur l’ensemble des composantes du réseau.
Le mandat de grève a été fort. Ce sont 98 % des membres qui ont voté en faveur d’un mandat de moyens de pression allant jusqu’à la grève générale illimitée. […]
Le mandat de grève a eu des effets positifs. Avant ce mandat, l’employeur avait l’habitude d’annuler des rencontres de négociation. Après l’adoption de son mandat de grève, aucune rencontre n’a été annulée.
Les Syndicats des chargées et chargés de cours de l’UQTR, qui n’était pas membre de la FNEEQ-CSN, a été au centre de cette « round » de négociation. Une grève de neuf semaines a pris fin avec un rattrapage salarial de 9 %. François Cyr, vice-président de la FNEEQ, avait dénoncé l’entente de Trois-Rivières, notamment parce que le rattrapage salarial n’était pas suffisant à ses yeux. On craignait, à l’époque, que cette entente constitue un modèle dans les autres universités en négociation. La direction de l’UQAH considérait alors que l’accord obtenu à Trois-Rivières était satisfaisant et voulait s’en inspirer dans la négociation à Hull.
Une entente de principe est survenue « à la Saint-Jean Baptiste à 3 h du matin ». L’appui inconditionnel de l’Association générale étudiante de l’UQAH a été déterminante dans le conflit. Bernard Campeau, directeur de l’AGE-UQAH, déclarait :
À l’UQTR, les étudiants ont commencé leurs moyens de pression aujourd’hui. Ils ont établi un blocus du pavillon administratif, dans le but d’accélérer la négociation entre le syndicat et la direction. À Hull, l’AGE prévoit faire de même si le syndicat se donne un mandat de grève. Pour chaque jour de grève, les étudiants perdent une journée de cours pour laquelle ils ont payé.
Au final, le Comité de négociation du SCCC-UQAH a obtenu une augmentation de 20 % à compter du 1er janvier 2002, où la rémunération de la charge est passée de de 4800 $ à 5821 $ par cours. Cette entente a été entérinée par 80 % des membres.
Chose étrange : pendant que la négociation piétinait, les relations de travail au quotidien se déroulaient bien. André-Jean Pelletier avait été directeur de la gestion académique, puis doyen de la gestion académique, jusqu’en 2008. Il a donc été le principal vis-à-vis patronal pendant près de 15 ans. Sous sa direction, les griefs étaient peu nombreux et les relations de travail au quotidien étaient bonnes. C’était un homme de compromis qui cherchait des solutions. À l’opposé, les trois premières négociations étaient particulièrement houleuses. La négociation des personnes chargées de cours se faisaient souvent éclipsées par celle des professeures et professeurs. De plus, c’est surtout sur les questions monétaires que les négociations bloquaient.
Source : HARVEY, Nicolas, Serons-nous radicaux ou conciliants? Histoire du Syndicat des chargées et chargés de cours de l’UQO, Gatineau, SCCC-UQO, 2018, 94 p.
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